3.2.2 Les limites des méthodes de valorisation
Les limites théoriques
> La valorisation passe-t-elle forcement par un cadre de contrôle de gestion ?
La revue de littérature que nous avons réalisé a montré que la question de la valorisation des connaissances était étudiée de manière intensive par le courant du contrôle de gestion. Baruch Lev (2000) résume la problématique de ce courant soulignant les limites des méthodes de reporting malgré la reconnaissance des actionnaires pour les actifs basés sur la connaissance : "By and large, investors recognize the primacy of knowledge assets as value- creators, but don't count on capital markets to value properly in real time those assets.  The combination of outdated accounting (disclosure) rules, the high uncertainty associated with most knowledge assets, and investors' preference for quick gratification in the form of high corporate earnings, leads to large groups of knowledge-intensive companies being systematically undervalued by investors and subjects such companies to excessively high cost of capital” (Lev, 2000) (La combinaison de règles comptables surranées avec la grande incertitude qui entoure la plupart des actifs et la préférence des investisseurs à investir à court-terme entraîne une sous- valorisation des entreprises qui produisent et vendent des connaissances.) Nous pensons que la modélisation de la valorisation des produits issus du management des connaissances doit s’appuyer sur des modèles évolués et équilibrés comme ceux d’Edvinsson ou de Sveiby.
> La nécessité d’avoir un modèle multicritère mais également dynamique
Comme le souligne Philippe Lorino (1997) l’apport incontestable de Kaplan et Norton avec le concept de “Balanced Scorecard” a permis de mettre en avant la notion de modèle causes-effets sous-jacent à la relation entre stratégie et pilotage de la performance, le caractère multicritère de la performance stratégique et les limites d’un pilotage exclusivement focalisé sur la performance financière. En revanche, force est de constater que les approches dynamiques, c’est-à-dire étudiant les flux des connaissances, sont peu développées dans la littérature. Même Kaplan et Norton ne développe que très peu cette approche (nous trouvons des références sur les approches dynamiques dans une note de leur livre !). Ainsi les modèles équilibrés (de Kaplan & Norton, Edvinsson  & Malone, Sveiby) présentent les limites suivantes :
- ils ne traitent pas de la question centrale, celle de la construction de la “ théorie de la performance ”, en d’autres termes du modèle causes-effets,
- ils tentent d’identifier une structuration standard et universelle en quatre perspectives, en tournant le dos à la contingence stratégique du pilotage,
- ils ne prennent pas vraiment en compte l’incertitude et les décalages temporels liés à l’apprentissage,
- ils n’explicitent pas la relation du système d’indicateurs avec l’action (organisée en plans d’action ou non) (Lorino, 1997).
Les limites pratiques
Les techniques de valorisation des actifs immatériels ont été peu appliquées dans les entreprises.
Notre étude quantitative nous a montré que les entreprises développaient leur propre méthodes de valorisation car elles perçoivent les approches équilibrées comme compliquées à mettre en place.
Lorino (2001) en appelle donc à une construction contextuelle du modèle de notation équilibrée : « une approche reposant sur une méthodologie de construction plutôt que sur une structure standard de tableau de bord, croisant les dimensions “ axes stratégiques ” et “ processus d’action ”, positionnant les outils de pilotage comme supports heuristiques du raisonnement plutôt que comme modèles scientifiques de la performance semble mieux à même de répondre à ces questions ».
Ces modèles ne sont donc pas une fin en soi mais des supports très riches pour conduire le raisonnement et la prise de décision des acteurs.